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Fundamentals of Language, Jakobson (1963) ‖ pp. 108-109 Insertion A verso ‖ Derrida's Margins Skip to annotations

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Fundamentals of Language

Jakobson, Roman

1963

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Annotated pages

p. 111 p. 116 p. 117 p. 162

Insertions

pp. 86-87 Insertion A recto pp. 86-87 Insertion A verso pp. 108-109 Insertion A in situ recto pp. 108-109 Insertion A in situ verso pp. 108-109 Insertion A recto pp. 108-109 Insertion A verso pp. 116-117 Insertion A recto pp. 116-117 Insertion A verso pp. 162-163 Insertion A recto pp. 162-163 Insertion A verso

Page text (OCR generated): Littérature
a . ‘:-‘A:."I:C’/.‘ n‘fz- ”4 _
9,3,3,» Ivan" -
Questionner Jakobson
influence par les travaux de jeunesse
du grand disciple de Saussure, Seche-
haye. Ce que l’on désigne maintcnant,
avec Martinet, comme la double ar-
ticulation s’y trouvait de’ja écrit. Je
disais les deux << etages >>, l’etage
phonologique — celui des unites dif-
fe'renciant le sens sans avoir 1e sens,
c’est—a-dire les phonemes ~—- et l’étage
grammatical.
Tynianov
J.—P. F. ~— Une chose fait mon ad-
miration. En 1928, vous étes present
au premier Congres International
des Linguistes, a La Haye, pour y
presenter avec Troubetzkoy et liar-
cevski la fameuse Proposition 22 :
l’acte de naissance de la phonologie.
Et la meme année, vous publiez avec
Tynianov les 8 propositions sur << les
Problemes des études littéraires et
linguistiques >>. Avec trente ans
d’avance veritable manifeste d’une
critique structurale... Mais comment
pouviez-vous étre partout ——.- avec
Troubetzkoy dans le Cercle de Prague.
(2), avec Tynianov a Moscou ?
R. J. — C’est Tynianov qui est venu
a Prague. Ses recherches étaient
alors extraordinairement en avance
sur son temps. On a dernierement
publié des lettres de lui : elles mon—
trent que ses éditeurs avaient atte-
nué l’audace de ses titres. << Seman-
tique du vers >> était‘devenu << Pro-
blemes du langage des vers >>. << Les
Archaistes novateurs » devenaient
« Archaistes et novateurs >>. Son plus
beau roman est La Mort de Vazir
Moukhtar.
Pour entendre la conférence que
Tynianov a faite parmi nous, a Pra—
gue, Troubetzkoy est venu de Vienne
ou i1 habitait.
Poélz'que er linguiszique
J .-P. F. —— Ainsi le lien n’a jamais
été rompu, pour vous, entre << recher-
che sur le langage poétique >> et lin-
guistique. En 1960, dans Linguistics
and Poetics, vous assurez qu’ << une
analyse minutieuse du langage exige
que l’on prenne en consideration la'
fonction poétique ».
R. J. —— Il n’y a jamais en, en
Russie, de separation entre littéra—
ture et linguistique. C’était la, sans
doute, la tradition de l’époque ro-
mantique qui se poursuivait. Aux
Etats-Unis, au contraire, ou domine
la tradition positiviste, je fais figure
de révolutionnaire, de « radical »,
parce que je repre’sente cette liaison.
Dans 1a tradition anglaise, déj‘a, la
linguistique est une branche de Fan--
tl'iropologie.
J.-P. F. —— On pourrait dire que,
faisant 1e chemin inverse, Levi-
Strauss a découvert aux Etats—Unis
l’anthropologie comme linguistique.
Mais la, dans le Cercle de New York,
”est vous qu’il a rencontre... L’unité
entre; linguistique et poétique.
R. J. —— Cette unite, en tout cas,
elle ”est aussi tout a fait dans la
.radition de Saussure. Voyez ses
Anagrammes. Je viens de voir 51 Ge-
néve. les manuscrits, grace a Staro-
binski. C’est son oeuvre la plus ge-
niale qui a effrayé meme ses dis—
ciples. D’ou leur tentative pour eacher
le plus longtemps possible cette part
des traV‘aux de Saussure. Celui-ci‘
pourtant écrivait‘ a ‘Meillet Que pour
lui c’etait essentiel.
J.-P. F. — Votre volume V des
Selected Works —- << Le Vers et ses
inaitres >> —contiendra—t—il des textes
sur la prosodie francaise ?
R. J . —— Non, car pour moi elle pose
les problemes les plus difficiles : je
ne vois toujours pas la fonction de
l’alternance entre rimes masculines et
féminines, par exempie, quand il
s’agit de << mange >> et « mangée >>.
Aragon l’a dit aussi.
Mais dans le volume V, i1 y aura
1111 article sur la métrique chinoise...
La seule a étre fondée sur l’asymétrie.
J.-P. F. —— Je vais faire un autre
coq a l’ane dans les années 30,
est-cc que l’idéologie de la droite
allemande, nazie ou prenazie, prend
(2) Jakubson arrive 51 Prague aprés 1920
au titre d‘attaché culturel sovictique.
Page 4
position contre le Cercle linguistique
de Prague ?
R. J. —- Oui. Nous étions attaqué5
par des linguist-es na21s tels que Weis—
gerber.
J.-P. F. — En mars 39, i1 était fa-
cile de franchir les frontieres de la
Tchécoslovaquie ‘2
R. J. — A l’arrivée des nazis, j’ai
pris le train pour... Berlin.
J.—P. F. —— 11 s ffisait d’y penser.
R. J. —— Le moment difficile a été,
tout de meme, 1e passage de l’une a
l’autre des gares berlinoises. Car 21.
tout moment on pouvait étre inter-
pellé. Je me suis assis au buffet, et
j’aiécrit des cartes postales pour mes
arms.
L’abslraction
J .-P. F. — Une double mythologie
prend forme, ici ou la, a propos de ce
mouvement de pensée qui precede de
vous et de la linguistique structurale.
L’une vous attribue —— ainsi qu’a Bar—
thes —— une << théorie >> selon laquelle
<< l’émotion >> doit étre exclue de
l’oeuvre au profit de la structure...
L’autre prétend que, pour vous, l’in—
terprétation doit faire abstraction de
13. << Vie réelle >>...
Pour moi, il est evident que ces tra-
ductions mythologiques n’ont rien ‘a
voir avec votre pensée. Et si l’on com-
mence par la seconde, d’avance vous
lui répondiez en 1928, avec Tynianov,
dans la derniere proposition : << Qn
ne peut pas résoudre 1e probleme
concret du choix d’une direction ou
au moins d’une dominante, sans ana—
lyser la correlation de la série litté-
mz’re avec les autres series sociales. >>
R. J. —— Je suis d’accord avec vous.
D’ailleurs quand on me demande si
je suis on non << structuraliste >>, je
réponds toujours que je n’aime pas
beaucoup les << ismes >> en science et
en littérature.
Mais, d’autre part, je ne sais pas
comment l’on pourrait, quand il s’agit
de travailler sur les langues et sur
1’art, ne pas tenter d’en saisir la
<< structure >>. Ceux qui parlent d’au-
tre chose font de la causerie, non de
la science.
Pour ceux qui ont peur de l’abstrac—
tion, il faudrait distinguer entre la
mauvaise abstraction, celle qui ne
tient pas compte de la << réalité >> en
question, et l’autre abstraction. Car
pour nous << science >> veut dire une
relation trés étroite entre théorie et
empiric. Et il n’y a pas de science
sans abstraction.
J.—P. F. —— Les deux mythologies
reviennent a ceci 1e reproche fait
a votre influence, indirecte ou di—
recte, de tendre vers une littérature
<< abstraite >>, un << art abstrait >>.
R. J. — Je ne comprends pas trop
bien. les slogans contre la << tendance
abstraite >> dans l’art. Parce que tout
art nécessairement abstrait certains
elements. Il est nécessairement selec—
tif, done << abstrait >>.
J.—P. F. -—~ Abstrait comme adjectif,
parce qu’il l’est comme verbe.
R. J. - Oui. Et cela peut étre, dit
de toutes les écoles littéraires. De—
puis l’Antiquite et l’Inde ancienne ~—
en passant par Boileau... ——- nous
voyons que l’art de la poésie est aussi
<< l’Art Poétique >>, c’est—a—dire la
théorie de la poész’e. Les deux ont
toujours marché ensemble. Ce qui ne
veut pas dire des rapports d’harmo-
nie idyllique, mais egalement de duel,
de lutte. Entre les deux passent
amour et haine. Mais l’indifférence
de l’une envers l’autre est un fait
pathologique. Tout isolationnisme est
pathologique. Et l'on confond trop
souvent l’autonomie de la creation ——
ou de la théorie — avec cet << isola-
tionnisme >>.
J.—P. F. ——- C’est dire combien 11 y a
d’inconséquence a assurer, comme
vient de le faire encore Sartre, que
<< l’application du concept de struc-
ture >> est en critique littéraire << tres
hasardeuse >>. Alors que la force de
cette pensée est d’étre née d’une
« critique littéraire >> justement. En
contact étroit avec un mouvement de
creation. Creation littéraire 1e fu—
turisme. Mais aussi creation plasti-
que : l’actlon de Maiakovski s’est
faite sous le signe du cubo-futurisme.
R. J. —— Des 1919, il est vrai, dans
le Cercle de Moscou, plusieurs confe—
rences étaient données par nous sur
les fonctions des éléments phoniques
dans la poésie et la musique. Ceux qui
ont exercé sur moi le plus d’influence,
ce sont les artistes, non les savants.
Picasso, Braque, Khlebnikov, Joyce,
Stravinsky. En 1913-1914, j’ai vécu
parmi les peintres, j’étais l’ami de
Malevitch. Il voulait que je vienne a
Paris.
J .—P. F. —- Ce qui alors avait lieu
a Petersbourg et Moscou, ce n’était
pas seulement le plus lointain écho
du cubisme francais. C’était 1a nais—
sance du constructivisme et de l’art
abstrait. Malevitch, en effet, et Kan-
dinsky.
R. J. -— Malheureusement, jusqu’a
present, alors que la peinture fran-
gaise est exposée, les << abstraits »
russes demeurent dérobés au public.
Et aussi, seul dans la generation des
cubistes, le Douanier Rousseau.
J .—P. F. —- Fort peu abstrait appa-
remment.
R. J. -— Ce sont les mysteres de la
bureaucratic.
L’e’motz’on
J.—P. F. —-— Il faut revenir sur la
premiere mythologie : la poétique de
la linguistique structurale exclurait
« l’émotion >>...
A ce propos j’ai relu votre texte
de 1960. Parmi les six fonctions du
langage qui s’y trouvent décrites, il
en est deux qui ont entre elles, me
semble-t—il, une relation singuliére.
Fonction émotive et fonction poéti-
que. Celle-la vise a << une expression
directe de l’attz’tude du sujet >> envers
ce dont il parle. Celle-ci << vise le
message en tant que tel >> : elle met
en evidence, << 1e ceté palpable des
signes >>. N’y a-t-il donc pas entre
elles un rapport privilégié ? Plus 1a
presence du sujet est comme mar-
que’e sur le message, plus 1e message
lui-méme est mis en evidence comme
tel, rendu palpable. Ou encore : plus
il y a irruption emotive du sujet, plus
ont chance de surgir des effets de
complexité —- de structure, si l’on
veut —- riches et imprévisibles ?
R. J. —- Si vous posez la question de
l’affectivité : je ne crois ni aux arts,
ni meme aux sciences, qui seraient
dépourvus de cet ingredient... Proje-
ter dogmatiquement dans la réalité
la separation didactique entre les di-
verses fonctions de la langue --— co-
gnitive, emotive, poétique —— c’est une
des formes de cet isolationnisme dont
nous parlions. Je ne crois pas aux
activités castrées, éliminant totale-
ment l’une de ces fonctions, au lieu
de les faire agir a l’intérieur d’une
échelle.
J .-P. F. —— Meme les sciences, di—
siez—vous...
R. J. ———— Oui. Ceux qui ne percoivent
pas la valeur cognitive aussi bien
qu’émotive de l’ceuvre d’Apollinaire
ou de Khlebnikov, de Picasso ou de
Kandinsky —— ou la valeur emotive et
artistique clans l’oeuvre scientifique
de Saussure, de Levi-Strauss, de Ben—
véniste, ceux-la ne font que trahir
leur esprit << isolationniste >>...
M arxz'sme
er nguzslzque struczumle
J .-P. F. —- En somme, les deux my-
thologies dont nous parlions ont cet
<< isolationnisme» en commun. Ou cet
aveuglement : elles ne voient rien de
ce mouvement qui avance par plu-
sieurs voies. Exploration émotive des
formes, qui tout a la fois suscite sa
conscience << théorique » et découvre
ses correspondances << réelles >>. Beau—
coup ne 1e savent pas, qui pourtant
ont hérité de ce tournant dans
l’avant-garde russe entre 1917 et
1920 : dans ce que la droite nationa-
liste allemande avec obstination,
Goebbels compris, appellera Kultur-
bolschwz’smus...
Mais comment percevoir les rela-
tions entre le marxisme et ce mou—
vement ?
R. J. —— Entre eux, je ne vois pas
du tout d’opposition. Des ces années-
la je n’appréciais guere la boutade de
Chklovski : << Dans l’art, la couleur
du drapeau qui couronne la citadelle
ne peut étre aucunement reflétée... >>
Avec les Moscovites — le Cercle de
Moscou — je disais plutét il n’y a
pas de rapport mécanique entre ces
plans...
J.-P. F. — ...Entre 1a série litté—
raire et << les autres series sociales >>.
R. J. —— Oui. Mais 1a série littéraire,
art et langue a la fois, fait partie
d’un systeme plus vaste. C’est un
rapport de substructures a l’intérieur
d’une structure plus ample. La lan-
gue n’est qu’un des systémes de si-
gnes. Nous considérions, Tynianov et
moi, que Chklovski partait en guerre
contre une simple déviation méca—
niste, et qu’il tombait lui-méme en
passant dans le piege de cette « dé-
viation mécaniste >> par ses propres
proclamations.
J.-P. F. —— Vous dites, clans votre
preface au recueil des Formalistes
russes (3) : slogans naifs. ' ”
R. J. -— Tout en m’opposant aux
tentatives << hétéronomistes » pour
étudier un plan dela Vie culturelle
et sociale comme une derivation mé-
canique des autres plans, d’un autre
coté je dois dire qu’il serait vain de
dissocier violemment les rapports en—
tre tout et- parties.
Le beau travail du grand écono—
miste polonais Oskar Lange sur les
<< Tout >> et les parties — Whales and
parts -— est aussi prometteur pour la
dialectique de la langue, de la pensée
et des arts, qu’il l’est pour l’économie.
J.-P. F. —- Récemment je lisais,
dans le livre II du Capital, ce que
Marx écrit ‘a propos du tableau éco-
nomique de Quesnay. 11 oppose a cer—
tains points faibles dans l’analyse
d’Adam Smith la méthode de Ques-
nay, capable de « faire dériver les
differences a partir du procés >>.
R. J. -—. Je ne connaissais pas ce
texte, mais J’ai dit ceia aussi...
J .—P. F. —— Je croyais vous entendre
en effet en lisant cela.
Ce qui est né aux cetés de ce mou—
vement de science abstraite, c’est
donc l’art le plus << concret ». Lui' qui,
accrochant de toutes parts les << diffé-
rences >>, tente justement de saisir
le proce‘s. L’action meme, concrete, en
train d’opposer les uns aux autres les
elements. Cette action qui est lan-
gage, et rapport ou récit, tout le
temps.
Nous sommes quelques-uns a trou—
ver en vous la pensée dominante de
notretemps, parce que cette pensée
seule a accompagné tout au long la
propagation des esthétiques les plus
mordantes. Et, contrairement a Sar-
tre, par exe'mple, sans cesser de sa-
voir d’ou elle Vient. En art en en
poésie, un mouvement peut naitre
de n’z’mporte oil, mais pour découvrir ,
en route d’ou i1 Vient.
- R. J. —— Ce sont les rapports qui
sont l’essentiel : idée qui est si forte
dans le cubisme.
Jean-Pierre Faye.
(3) Théorie de la littérature. collection
Tel Quel, 1965.
Flashes
sans commentaire
@ Sept peintres et écrivains du Mo-
zambique, dont 1e poéte mulatre José
Craveirinha, ont été condamnés a des
peines de prison pour s’étre livrés a
des << activités subversives >>, bien que
le tribunal militaire les ait récemment
disculpés. Le poete Craveirinha a été
condamné a deux ans et demi de pri-
son, a la privation de ses droits civi-
ques pendant quinze ans, ainsi qu’a -'
des détentions préventives renouvela-
bles de trois ans. Les six autres ont
été condamnés a des peines de deux
ans.
e Une exposition consacrée a la vie
et l’oeuvre de Carl Th. Dreyer a été
inaugurée ce lundi a la Maison du
Danemark, 142, av. des Champs-
Elysées; elle sera ouverte jusqu’au
dimanche 4 décembre 1966.
0 Au cine-club « Action >> (cinema
Le Paris, 56, av. de Saint-Onen, Pierre
Juquin présentera, 1e mardi 22 no-
vembre a 21 h, deux longs métrages :
la Lutte finale et Lém‘ne, de Serge
Klarsfeld.
. Au comité du Film ethnographique
(Musée de l’Homme), 1e mercredi
23 novembre, a 18 et 21 h : l’Ile nue,
de Kaneto Shindo (Japon).
17 novembre 1966

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